Lucid Air

Une grosse berline électrique surpuissante, née dans la Silicon Valley. On a déjà vu ça quelque part… Sauf que l’argument principal de la Lucid Air est justement qu’elle n’est pas une rivale de la Tesla Model S.


Publié le : 10 janvier 2023

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Plus les algorithmes vous sentent taquin, plus ils basculeront de puissance sur l’essieu arrière

Lucid la considère en effet officiellement comme une concurrente électrique de la Mercedes Classe S. Donc de l’EQS, et de tout ce que BMW et Audi peuvent avoir dans les cartons sur ce segment. Corollaire, elle ne met pas en avant ses accélérations mais plutôt son autonomie : jusqu’à 840 km, l’équivalent d’un gros réservoir de gazole au bon vieux temps (le diesel, vous vous souvenez ?). Pour cela, il faut choisir cette version Dream Edition R (946 ch) parmi les cinq de la gamme, de la Air Pure (487 ch, 650 km d’autonomie) à la Air Dream Edition P, qui sacrifie l’autonomie sur l’autel des performances (1126 ch, 760 km, 0 à 100 km/h en 2,5 s). 

Le prix varie du simple au double, de 77 400 $ pour la Pure (environ 76 000 €) à 169 000 $ pour l’Edition P (166 000 €). Hormis la Pure, toutes profitent d’un moteur par essieu et sont donc des intégrales.

Malgré la priorité donnée au luxe, parmi les ingénieurs européens qui ont traversé l’Atlantique pour s’assurer que la Air se conduise comme il se doit, on trouve des spécialistes châssis de chez Aston et Jaguar, ou encore l’aérodynamicien Jean-Charles Monnet, ex Red Bull. La voiture que vous avez sous les yeux revendique un Cx de 0,20, comme une EQS. Mais en ressemblant davantage à quelque chose… Pardon, c’était gratuit.

Pour arriver à l’autonomie revendiquée, il faut toutefois renoncer à nos jantes 21 pouces, qui font perdre 64 km sur la fiche technique par rapport aux 19 pouces de série. Après, sur un chargeur rapide, la différence se limite à une poignée de minutes si vous en trouvez un capable de vous rendre 480 km d’autonomie en une demi-heure, comme promis par Lucid.

Même sur ces grosses roues, la Air est merveilleusement amortie. Souple et feutrée à souhait, elle sait tirer parti de ses 2,3 tonnes. On sent que Lucid a consacré des moyens considérables à débaucher des gens qui savent ce qu’ils font. Si cette voiture se veut avant tout une limousine attentionnée et suprêmement silencieuse – mission accomplie –, de gros efforts ont indubitablement été faits pour qu’elle soit aussi amusante à conduire.

Vous avez le choix entre trois modes : Smooth, Swift et Sprint. Vous n’utiliserez Sprint qu’une seule fois – pour tester l’effet bœuf des 946 ch à l’accélération –, avant de vous caler en Smooth pour tous les jours, et en Swift sur vos petites routes préférées. Ces deux réglages brident la puissance à moins de 600 ch, mais si l’on ne nous l’avait pas dit, on ne l’aurait peut-être même pas remarqué tant la Air reste vigoureuse.

De mode en mode, l’amortissement, la direction et le freinage s’affûtent, de façon relativement subtile. La Air ne se transforme pas subitement en pistarde d’élite, mais elle devient étonnamment vive d’un virage à l’autre. David Lickfold, ancien de chez JLR, a veillé à ce que le châssis réponde intelligemment à votre humeur. Quand vous cruisez, la Air n’utilise ainsi que deux roues motrices et la réponse à l’accélérateur s’adoucit. Elle ne prend réellement vie que lorsqu’elle sent que vous en voulez plus. Plus les algorithmes vous sentent taquin, plus ils basculeront de puissance sur l’essieu arrière (jusqu’à 70 %). On n’a jamais l’impression qu’elle rétrécit et s’allège comme les meilleures superberlines thermiques, mais compte tenu des masses en jeu, le résultat reste époustouflant. Quel que soit le mode, il y a un petit cran de sûreté sous le pied droit, un demi-centimètre de « Vous êtes sûr ? » pour éviter les gaffes. Comme ça, si vous éternuez à un stop en mode Sprint, vous avez une chance.

D’ailleurs, activer le mode Sprint sur une route de canyon californienne, c’est un peu comme balancer un feu d’artifice dans vos toilettes. Brièvement grisant, rapidement effrayant. On peut s’attendre à ce que les modèles d’entrée de gamme soient déjà bien assez performants pour la route.

En revanche, ces derniers n’auront pas droit au pare-brise panoramique qui donne à l’habitacle de notre Air son atmosphère si… aérienne. C’est moins formel que dans une allemande, tout en étant un peu plus conventionnel qu’à bord d’une Tesla. Dans le bon sens du terme. Si le pilotage des fonctions châssis se fait via une grande tablette verticale, il y a aussi, attention les djeuns, des “boutons”.

Ceux d’entre nous qui ont connu le monde d’avant les smartphones ne pourront qu’admirer la façon dont Lucid est parvenu à mêler analogique et numérique. On sélectionne les modes de conduite sur un écran, mais on règle la clim avec des boutons. L’instrumentation est numérique mais placée exactement là où on l’attendrait. Le volant est – tenez-vous bien – presque parfaitement circulaire. Un petit méplat pour la frime, mais pas de forme en yoke bizarroïde.

Ensuite, il y a les matériaux. Vous pouvez opter pour une sellerie cuir intégrale si ça vous chante, mais Lucid propose aussi une version PurLuxe sans matières d’origine animale. Vous pouvez aussi garnir la planche de bord et les contre-portes de laine d’alpaga (comme sur notre Dream Edition R). Évidemment, c’est animal, mais déjà plus soutenable que du cuir.

À part les sublimes gâchettes de portière et les vigoureuses fonctions massage, le plus gros atout de cet habitacle est son silence. C’est là qu’on se rappelle que Lucid veut d’abord chasser sur les terres de la Classe S. Souvent, l’absence de moteur essence ou diesel fait ressortir tous les autres bruits. La Air parvient à rester impeccablement ouatée, même sur l’autoroute.

Les places arrière sont vastes, quelque part entre une Tesla Model S et une Mercedes Classe S. Les plus grands risquent cependant d’avoir du mal à glisser leurs orteils sous les sièges avant. Il y a tout ce qu’il faut pour les bagages : 458 l à l’arrière, où le couvercle de malle englobe les feux et déborde généreusement sur les ailes pour faciliter le chargement, et 280 l à l’avant (tout en longueur : les objets un peu volumineux devront aller à l’arrière).

Vous vous demandez en quoi tout ça vous concerne ? Selon Lucid, la Air est une voiture globale. Si la marque va la commercialiser en priorité aux États-Unis, où son lancement a déjà été maintes fois reporté, l’Europe suivra. Vu son positionnement, elle sera forcément plus chère qu’outre-Atlantique, mais face à une Model S et une Classe S qui attaquent toutes deux aux alentours de 100 000 €, une Air propulsion de 487 ch a toutes les chances d’être une proposition tentante.

Notez que les Air haut de gamme chaussent des 21 pouces par défaut. Les jantes de 19 et 20 pouces, indispensables pour espérer reproduire les chiffres d’autonomie annoncés, sont à cocher parmi les options. Idem pour le système DreamDrive Pro, l’arsenal d’assistances à la conduite de Lucid. Ce dernier sera peut-être de série en Europe, c’est devenu crucial pour faire bonne figure dans les classements EuroNCAP.

Une chose est sûre, cette voiture a du potentiel… si elle ne se fait pas trop attendre. Un comportement plus tranchant et un intérieur plus cossu que n’importe quelle Tesla, avec une autonomie record et la fraîcheur de la nouveauté : l’air de rien, ça peut marcher.

En savoir plus à ce sujet :

Lucid Air

Année
2022
Prix mini
166 000 €
Type de moteur
Électrique
Longueur
4970 mm
Largeur
1970 mm
Hauteur
1410 mm
Poids
2290 kg
Boîte de vitesses
Monorapport
Nombre de rapports
1
Transmission
Transmission intégrale
Puissance
946 ch
Couple
1390 Nm
0 à 100 km/h
2,7 s.
Vitesse max
270 km/h
Temps de charge
45 min
Capacité
100
Autonomie
685 km