Alpine A290_B : Il va y avoir du sport

Une nouvelle Renault 5 électrique est en approche mais c’est elle que vous voudrez. L’hommage d’Alpine à la R5 Turbo, l'Alpine A290_B

| Publié le : 9 mai 2023

Les concept cars se divisent en deux catégories. D’un côté les pseudo-soucoupes volantes qui ne seront jamais plus que des fantasmes automobiles réservés à un monde lui-même fantasmé. De l’autre un aperçu objectif de la direction stylistique d’un futur modèle à qui il reste encore à passer les filtres de la faisabilité industrielle et, surtout, financière.

L’Alpine A290_ß appartient clairement à la seconde catégorie. Depuis sa renaissance, Alpine est devenue la branche sportive et compétition de Renault avec une A110 dont le rapport prix/performances/sensations est, encore aujourd’hui, absolument imbattable, et une écurie de Formule 1 plutôt efficace. Mais si vous vous demandez de quoi l’avenir d’Alpine sur route sera fait, la réponse est sous vos yeux. La promesse est ambitieuse : l’Alpine A290_ß veut préfigurer les petites sportives de l’ère électrique.

En nous disant bonjour, Raphaël Linari, designer en chef sur le projet, sourit comme quelqu’un “qui sait”. Puis il nous dit que ce que nous avons sous les yeux est fidèle à 85 % à la version de série. Une très bonne nouvelle parce que, sincèrement, c’est l’un des show cars les plus aguicheurs que nous ayons vus ces dernières années.

Puis il enchaîne avec un truc auquel on ne s’attendait pas. « Laurent Hurgon, le pilote-essayeur maison, a passé les dernières semaines à mettre au point cette voiture. Depuis le tout début du projet, nous savions que nous voulions un prototype roulant, une voiture qui puisse rouler en ouverture d’une course de Formule 1 par exemple. C’est pour ça qu’elle a un arceau. » Elle a même un frein à main hydraulique pour les runs. C’est un show car, pas un « simple » concept.« Je vous assure que tout est fonctionnel ! »

TopGear a déjà un certain vécu avec Laurent Hurgon. Nous avions eu l’honneur de lui servir de sac de sable sur la piste d’essai Renault d’Aubevoye à bord d’un prototype d’A110 six mois avant son lancement en 2018. Il l’avait fait danser à des vitesses inimaginables. C’est un sorcier.

À l’évidence, la A290_ß est liée à la Renault 5 électrique qui devrait arriver courant 2024. Vous savez, la Renault 5. Celle qui a fait sauter Internet quand Luca de Meo, le patron de Renault, l’a annoncée à la fin de sa conférence de presse sur la “Renaulution”, le redressement du groupe, en 2020, quand le monde a commencé à sortir en boitant des confinements successifs. Dans sa vie d’avant, de Meo avait redonné vie à la Fiat 500. Il a semble-t-il eu la même bouffée d’exaltation quand Laurens van den Acker, directeur design du groupe Renault, lui a montré la Renault 5. Et ça a été la même chose avec cette version Alpine.

Souvent comparée à un Lotus français, Alpine a une histoire qui se perd en grande partie dans la nuit des temps. En plus de l’A110 d’origine, si vous ne les connaissez pas, nous vous invitons à découvrir les A310 des années 70 et A610 des années 80. Elles sont toujours aussi spectaculaires aujourd’hui. Évidemment, les passionnés de sport automobile n’auront pas oublié la magnifique A220 de 1968 et l’A442 qui a remporté l’édition 1978 des 24 Heures du Mans. Et bien sûr, il y avait déjà eu une première R5 Alpine, avant la R5 GT Turbo.

Et on retrouve tout ça dans cette Alpine A290_ß. Elle est courte, large, trapue, et avec suffisamment de détails et de clins d’œil historiques pour contenter les Alpiniens sans tomber dans le pastiche rétro lourdingue. Même si vous n’avez jamais entendu parler d’Alpine, tout ce dont vous avez besoin, ce sont des yeux et un peu de bonne foi pour reconnaître un travail de haute facture. Cette A290_ß maximise les arches déjà gonflées du concept R5, ajoute un becquet avant, un inévitable diffuseur arrière obligatoire et un généreux aileron arrière. Des éléments de langage stylistique empruntés à la R5 Turbo des années 80 et… ce n’est évidemment pas une mauvaise chose.

Mais il y a aussi une différenciation significative des deux marques. La face avant est plus lisse et fait écho au nez de l’actuelle A110, véritable mètre étalon dans l’art complexe de rendre hommage au passé sans tomber dans le design rétro lourdaud. La configuration à quatre feux est une signature Alpine et, bien que les blocs additionnels carrés de la A290_ ß et les longerons en aluminium qui leur servent de supports n’aient aucune chance de passer le stade de la production, les X, évocation des Scotch de masquage des phares de compétition lors des passages sur routes ouvertes, ont peut-être une chance de se retrouver sur le modèle de série, au moins pour la signature lumineuse diurne.

Les entourages des passages de roue, le becquet avant et les spectaculaires seuils sont en fibre de carbone forgée et incrustée de bandes de fibre de verre bleue. Un carbone forgé qui évoque le côté minéral de la roche. En fait, toute la carrosserie est en fibre de carbone, et elle est recouverte d’une peinture mate blanche incrustée de paillettes qui lui donnent l’aspect de la neige fraîchement tombée qui brille sous la lumière du soleil. Vous l’aurez compris, si le bleu Alpine n’a pas été retenu, la couleur et les matières sont là pour rappeler les montagnes qui ont inspiré le fondateur d’Alpine, Jean Rédélé. Autre référence aux montagnes : les triangles présents absolument partout. Sur les stickers de la déco, évidemment, mais aussi là où vous ne les voyez pas. Les X dans les phares, deux triangles l’un sur l’autre. Et ces jantes de 20 pouces qui semblent vouloir résoudre la quadrature du cercle ? Un carré en leur centre ou… quatre triangles ?

« Nous voulons que les gens reconnaissent une Alpine à 290 m, puis à 290 cm, et à 290 mm. Et plus vous vous approchez, plus vous avez d’éléments de surprise », continue Linari. Ce show car est bourré de références, d’easter-eggs. Vous voyez les répétiteurs de clignotants qui viennent jusque dans les prises d’air du bouclier avant ? OK, ils sont bleus. Mais surtout, si vous regardez de très près, vous découvrirez les inscriptions Gasly d’un côté et Ocon de l’autre. Sur le montant de la lunette arrière, on voit des coordonnées GPS. Celle du studio de design Alpine. Et si vous jetez un œil par la fenêtre latérale arrière gauche, vous apercevrez un chien qui hoche la tête. Je n’aimerais pas voir ce pauvre toutou pendant un tour de qualif de Laurent Hurgon…

Il y a des prises d’air un peu partout autour de la A290_ ß, certaines fonctionnelles, d’autres plus là pour renforcer l’aspect compétition cher à Alpine. Il y a même deux éléments qui feraient penser à des échappements au-dessus du diffuseur mais, de près, ils ressemblent à des ventilos de PC ou de console de jeux. Et si cette A290_ ß ne dispose que de deux portes avant, la ligne inutile mais volontairement présente au-dessus des ailes arrière ne laisse aucun doute sur le fait que la version de série sera une cinq portes prévue pour un nombre de passagers standard. Ce qui ne colle pas vraiment avec ce que nous avons sous les yeux.

Le gros morceau de cette A290_ ß, c’est évidemment sa position de conduite centrale. Oui, comme dans une McLaren F1, dans l’Alpine A290_ ß le pilote prend place au centre et peut inviter deux passagers à admirer son pilotage. En étant placé derrière de chaque côté, la vue est dégagée sur le poste de pilotage. Laurent, si tu cherches un sac de sable… Car, aussi excitant que soit l’extérieur, c’est à l’intérieur que Linari et son équipe ont lâché les chevaux. Ou les watts en l’occurrence… « Il est encore trop tôt pour révéler ce qui se passera à l’intérieur de la voiture de série. Mais les sensations de conduite sont au centre de notre philosophie, donc nous nous sommes naturellement dit : “Et si nous mettions directement le pilote au centre de la voiture ?” » Ce qui nous a offert pas mal d’idées et de possibilités de styles. Parce que c’est quelque chose qui n’avait jamais été fait dans un format aussi compact.

Plutôt qu’un tableau de bord conventionnel, la 290_ß expose sa structure intérieure qui part des rétros et plonge vers l’avant, évoquant le nez et l’aileron avant d’une F1. Linari nous a dit qu’il aurait voulu que les pieds et les jambes du conducteur soient visibles, mais des problèmes structurels l’en ont empêché. Ce volant aussi, avec son affichage intégré et ses boutons, est inspiré de la F1. Comme en compétition, il s’agit d’un volant à fixation rapide et, pour les salons, il existe un autre volant beaucoup plus “lifestyle”. Le siège du conducteur est garni de pads recouverts d’un tissu réfléchissant baptisé Ultralumen. Quant aux baquets passagers, ce sont des éléments plus classiques, mais également tout en fibre de carbone.

Toujours dans cet esprit jeu vidéo, la lumière tient une place importante dans ce show car. Une ligne magenta traverse toute la voiture en son centre comme une colonne vertébrale (y’aurait pas un peu de Chiron dans votre Alpine ?), lumineuse dedans, neutre dehors, pour se terminer en troisième feu stop vertical sous l’aileron. L’effet est impressionnant et renforce cette sensation que le pilote est plus que jamais au cœur de l’action. La lumière bleue, quant à elle, est utilisée sur un axe horizontal à l’intérieur, embrassant les passagers et se connectant à une ouverture sous les rétroviseurs extérieurs. C’est du show à l’état pur, et rien de tout cela n’a évidemment pas la moindre chance d’avoir de descendance en série (pas dans ce siècle en tout cas), mais c’est très imaginatif et superbement exécuté.

Il y a également les gros seuils de porte typiques d’une voiture de course. Pour vous installer, il faut d’abord réussir à vous glisser sur l’une des places passagers en vous tenant à l’arceau, avant de vous translater vers la meilleure place, le baquet central du pilote. Linari dit que le becquet arrière et d’autres appendices aérodynamiques sont fonctionnels. Et s’il l’affirme, c’est parce qu’ils ont effectué une analyse dynamique des fluides par calcul. Encore une fois, c’est inhabituellement abouti pour un “simple” show car.

Tout cela n’augure que du bon pour la vraie A290 à venir. Elle reposera sur la plateforme CMF-EV de Renault codéveloppée avec Nissan et sera probablement alimentée par le moteur électrique de 215 ch actuellement utilisé dans la Megane E-Tech et par une batterie de 60 kWh. Les détails sont encore secrets, mais le patron de l’ingénierie de Renault, Gilles Le Borgne, a déclaré publiquement qu’il y aurait une vectorisation du couple et une maniabilité digne de ce que vous attendez d’une Alpine.

On a plus que hâte de découvrir la suite mais, franchement, ils nous avaient eus sur leur « Bonjour ».

 

 

Pourquoi A290_ ß

Bon, A, on ne va s’étendre… Ensuite, le 2 correspond à la catégorie. Le 1 restera réservé aux coupés sportifs, le 2 pour les compactes puis les 3, 4 et 5 pour les véhicules plus… grands, pour ne pas dire plus hauts… Quant au 90, il sera pour les Alpine un peu plus “lifestyle”, plus civilisées, à la différence du 10 qui restera dévolu aux modèles à vocation sportive. La A110 sera donc toujours un petit coupé sportif alors qu’un A590… Mais Antony Villain, le directeur design d’Alpine, nous a confié que la A290 serait la seule “dérivée” d’un modèle Renault. Les autres futures Alpine, SUV ou non, devraient donc être des modèles spécifiques.

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