BMW M135i : au volant de la prochaine rivale des Golf R et A35 AMG

La BMW Série 1 renonce à la propulsion. Promis, ça va bien se passer.

Stephen DOBIE • Niels de GEYER
Publié le : 27 mars 2019

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Le mode d'emploi va changer, et le plaisir y perdre un peu au profit de l'efficacité. Il n'empêche que les A35, S3 et Golf R ont du souci à se faire.

Fichtre, une voiture camouflée. Mais qu’est-ce que cela cache-t-il donc ?

Une toute nouvelle compacte sportive, pas tout à fait finie mais pas loin. Et quand on dit « nouvelle », ce n’est pas un mot en l’air : cette BMW M135i sera exclusivement disponible en quatre roues motrices et boîte auto, avec un moteur inédit sous son capot plus bombé que par le passé.

M135i, pas M140i ?

Bien vu. Cette troisième génération de Série 1 rompt totalement avec ses devancières : il s’agit désormais d’une traction, flanquée d’une transmission intégrale xDrive sur les versions les plus puissantes comme celle-ci. Qui abandonne aussi le six-cylindres, auquel le badge « 40 » est réservé chez BMW.

Normalement, c’est le moment où vous éructez toute votre rage de puriste face à cette litanie de sacrilèges. Ce n’est pas comme si on s’en doutait avec l’arrivée successive des Série 2 Active Tourer, Gran Tourer puis des X1 et X2… Qui sont tous très agréables à conduire dans leur genre, en passant.

Sauf que là on parle d’une compacte sportive, pas d’un SUV ou autre machin haut sur pattes…

BMW le sait très bien, et n’a pas lésiné sur la technologie pour que la M135i et le reste de la gamme fassent honneur à la réputation de la Série 1. Toutes ont ainsi droit à un système baptisé ARB – Actornahe Radschlupfbegrenzung, n’essayez même pas –, grosso modo un antipatinage ultrafin et réactif sur le train avant qui veille au grain en permanence, même lorsque l’ESP est désactivé. Résultat : aucun sous-virage, voire du survirage à la demande si vous êtes d’humeur taquine. Franchement, sur le mouillé, c’est magique.

La M135i hérite aussi d’un différentiel à glissement limité mécanique sur le train avant, tandis que le moteur est une nouvelle mouture du 2.0 turbo maison qui développera 306 ch et 450 Nm (sûrement celui que l’on retrouvera sous le capot de la prochaine Mini Cooper JCW GP). Des chiffres très proches de ceux d’une Mercedes-AMG A35 ou d’une Volkswagen Golf R qui sont manifestement ses cibles toutes désignées, quoi qu’en dise BMW.

Et au volant, elle leur ressemble ?

Notre premier essai de cet M135i a eu lieu sur circuit, à bord d’un prototype camouflé. Mais il laisse à penser que ce sera certainement une excellente auto sur la route, tout simplement parce qu’elle est incroyablement facile à conduire vite. C’était au cœur du cahier des charges, selon Peter Langen, responsable du département Dynamique de conduite chez BMW. Le résultat n’a plus grand-chose à voir avec la mini muscle car de la précédente génération.

Attention, du muscle, il y en a toujours. BMW n’a pas encore officialisé la feuille de temps mais la M135i égale au moins les perfs d’une Golf R ou d’une A35, c’est évident. La barre des 5 s sur le 0 à 100 km/h sera pulvérisée sans problème.

Ce moteur sera exclusivement associé à une boîte automatique à huit rapports – seules les Série 1 d’entrée de gamme seront proposées en boîte manuelle –, mais la Volkswagen et la Mercedes n’ont pas non plus de version à trois pédales. Cette boîte auto est de surcroît assez irréprochable, réagissant en un éclair aux palettes comme laissée à elle-même.

Finalement, qu’est-ce qui change vraiment ?

Son comportement en virage. Avec une propulsion à gros moteur et empattement court, passer fort peut être un peu délicat, notamment sur le mouillé. Les coups de volant doivent être propres et millimétrés si on ne veut pas se faire peur, la contrepartie étant qu’il suffit d’appuyer un peu plus fort sur la pédale de droite pour la mettre en travers. Puéril, mais jouissif.

Avec quatre roues motrices (optionnelles sur l’actuelle M140i, naturellement typée propulsion), on ne se pose plus de questions. On a maintenant une auto qui peut être brusquée sans aucune arrière-pensée. À vous de voir si vous considérez ça comme un avantage ou un inconvénient, selon ce que vous attendez d’une sportive. Certains adoreront par exemple le côté missile tout-temps d’une telle auto.

Mais… ?

C’est tellement facile que ça en devient moins gratifiant, il faut bien le reconnaître. Cette voiture a beau porter un badge M, elle distribue consciencieusement sa puissance entre les deux essieux et ne sera jamais aussi bêtement fun qu’une bonne vieille propulsion.

Son système xDrive est similaire au Haldex de la Golf R, et ne peut pas envoyer plus de 50 % du couple aux roues arrière. Conduisez-la tranquillement, et elle restera une simple traction.

Donc le drift, on oublie ?

Le train arrière est coopératif, c’est juste qu’il faut traiter la M135i comme une GTI traction pour le provoquer, au lever de pied ou sur les freins en entrée de virage. Elle reste indéniablement plus affûtée et plus typée que ses rivales, et on s’amuse toujours beaucoup dans l’absolu. L’ingénieur-chaperon assis derrière moi dans ce prototype y tenait beaucoup : « elle se doit d’être joueuse, c’est une BMW ».

Mais une fois l’arrière déverrouillé, quand votre instinct plaque votre pied sur l’accélérateur, la voiture abrège la glissade et se remet en ligne. Si la transmission intégrale était capable de transférer la majorité du couple à l’arrière (comme sur la précédente M140i xDrive), ce ne serait pas la même histoire, même sans forcément aller jusqu’à 100 %. Et ce n’est pas du snobisme de notre part, c’est juste que la Série a déserté la niche écologique qu’elle occupait vaillamment toute seule sur le marché des compactes sportives contemporaines.

C’est aussi ce qui fait potentiellement de cette nouvelle M135i une routière d’élite. Oui, elle sera moins rigolote sur circuit, mais dans la vraie vie, elle progresse à tous les niveaux et restera capable de provoquer un sourire et une poussée d’adrénaline dans un virage bien choisi. Vue de cette façon, elle apparaît parfaitement au point, voire surqualifiée pour aller défier la Golf R et l’A35 sur leur terrain.

La précédente Série 1 était très appréciée. Pourquoi ont-ils tout changé ?

BMW a réalisé que la plupart des acheteurs de Série 1 se contentaient des plus petits moteurs, et que le fait que ce soit une propulsion ne leur faisait généralement ni chaud ni froid (quand ils étaient au courant…). Vous voulez déprimer un coup ? La M140i ne représentait que 3 % des ventes, pour une immense majorité en transmission intégrale.

Passer à la traction (et se limiter au quatre-cylindres) permet aussi de progresser substantiellement en habitabilité, un critère décisif sur une compacte de grande série. La plupart des acheteurs de Série 1 seront ravis de profiter d’une voiture plus logeable et ne remarqueront jamais les sacrifices qui ont permis de l’obtenir.

Mais les passionnés, ils y pensent, aux passionnés ?

Si l’abandon du six-cylindres et de la propulsion vous reste malgré tout en travers de la gorge, BMW nous assure que la prochaine Série 2 Coupé y aura toujours droit, sa clientèle cible n’ayant rien à voir avec celle de la Série 1 (elle se vend essentiellement en M240i). Bref, si vous voulez une petite béhème à l’ancienne, ce sera toujours possible, à condition de renoncer au sens pratique et à la discrétion absolue d’une compacte cinq-portes.

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