Quelles sensations mécaniques ?

Époustouflantes. Il y a un turbo lag sensible tout en bas, où le moteur ne fait guère plus que grogner et hoqueter. Il faut un peu de gaz avant qu’il s’éclaircisse la voix. Grimpons dans les tours. Juste après 2 000 tr/min, les turbos commencent à souffler, discrètement d’abord puis avec de plus en plus d’assurance. C’est d’ailleurs à peu près tout ce qui se passe : le régime augmente, le bruit s’intensifie, mais la voiture ne va pas vraiment plus vite. À 3 000 tours, tout change. La pression des turbos dépasse celle de l’atmosphère et entre 3 et 5 000 tours, l’EB 110 commence à montrer ses muscles. Les reprises deviennent vigoureuses même aux standards actuels, disons du niveau d’une Porsche 992.

Si on est un peu habitué aux sportives turbo modernes, on s’attend à ce que cette poussée se poursuive de façon linéaire jusqu’à la zone rouge, quelque part vers les 6 500 tr/min. Mais il y a 25 ans, un moteur turbo se comportait tout autrement. L’aiguille du compte-tours de l’EB110 n’entre même pas dans le rouge avant 8 000 tr/min, le rupteur intervenant 500 tours plus haut. Mais ce qui rend ce moteur addictif, c’est la façon dont les turbos réagissent dans cette deuxième moitié du compte-tours. Le bruit est de plus en plus sauvage, les omoplates s’impriment toujours plus profondément dans le dossier, les yeux continuent de s’écarquiller. On arrive dans les eaux des supercars modernes : 600 ch pour seulement 1 200 kg, c’est un rapport poids/puissance proche de celui d’une McLaren 720S.

Les turbos semblent ne jamais devoir cesser de se gaver d’air, et la bande-son finit par se diviser entre le timbre de baryton du bloc et le sifflement aigu des turbos. Ce n’est pas un moteur au couple titanesque emportant tout sur son passage, c’est un V12 on ne peut plus vif qui préfère virevolter dans les tours et miauler à tout rompre. Le bruit et les sensations sont incroyables.