BMW XM

Question : le second modèle original de la division M de BMW est-il au moins un vrai M ?


Publié le : 11 avril 2023

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En fait, le XM est plein de qualités mais c’est comme s’il avait du mal à faire la synthèse de lui-même

Les plus Performances, gestion de son poids, confort, look... original ?
Les moins M...?!? Look... clivant ?

Année : 2018. Lieu : un bunker secret de la Division M de BMW. Une procession de Série 7 converge avec, à leurs bords, les grands patrons. « Bonne nouvelle messieurs » annonce l’un d’entre eux aux équipes M réunies « à l’approche de ses 50 ans, nous pensons qu’il est temps pour la division M de concevoir un modèle original. »

Une vague d’excitation se répand dans la pièce à la vitesse d’une M3 CSL. La division M n’a pas conçu de voiture originale depuis la M1 en 1978. Alors que de leur côté, Audi RS et AMG ont eu de quoi s’amuser. Et nous amuser au passage ! Et le patron reprend : « Nous pensons que le moment est idéal pour sortir un modèle hybride. » Les sourires se figent en pensant au surpoids. Mais Gunther, de l’équipe des motoristes, tente de rassurer Hans, de l’équipe Dynamique châssis : « Couple instantané, pas de lag de turbo, torque vectoring, centre de gravité bas… Imagine tout ce qu’on pourrait réaliser avec tout ça dans une voiture née sous le signe du M, une supercar digne descendante de la M1 ! ». Bravo Gunther, mission accomplie, Hans est rassuré.

« Ah oui, j’allais oublier » dit le patron en se retournant « ce sera un SUV avec beaucoup de place pour les jambes et un design… affirmé, pour le marché chinois. Tschüss!»

Retour en 2023. Le BMW XM est là et, comme son nom le suggère, il va tenter de marier la planche à billets de BMW, les X, avec tout ce que la division M a appris en matière de performances depuis un demi-siècle.

Pour être honnête, BMW s’est déjà confronté aux problème des gros et lourds SUV avec les X5 et X6. Et il faut reconnaître que ces engins ont contribué (pour le meilleur ou pour le pire) à démontrer qu’une débauche de savoir-faire technique et technologique pouvait avoir un résultat inattendu sur le comportement d’une brouette de parpaings. Et le succès a été au rendez-vous – le succès commercial, je n’ai pas parlé de réussite stylistique… C’est pour ça qu’aujourd’hui on se retrouve avec un génial X1, un énorme X7, et un représentant de chaque chiffre entre les deux.

Alors pourquoi ne pas l’avoir simplement appelé X8 ? Les ingénieurs BMW nous ont dit que « simplement » lui donner le chiffre d’après ne rendait pas justice à la puissance et à l’extravagance du XM. OK, alors pourquoi pas X653, rapport à la puissance ? Ou X800, pour le couple ? X2711, la masse totale. Ça sent l’extravagance X2711, non ? Parfait pour ses deux marchés de prédilection. Sans grande surprise, les États-Unis et la Chine devraient à eux seuls représenter plus de la moitié des ventes dans le monde.

De l’extravagance, le design du XM n’en manque pas non-plus, tant dans ses lignes que dans ses choix de couleurs.

BMW XM

Mais je ne peux pas dire qu’il est moche. Déjà parce que je sais que certains vont le trouver sublime. Et puis… mon avis n’est pas important. Ce qui est important en revanche, c’est que cette voiture ne laissera personne indifférent. On entend trop souvent que le monde de l’automobile est de plus en plus aseptisé et que tout se ressemble. Rien ne ressemble à ce XM. Et donc, plus que dans n’importe quelle autre voiture, rouler dans ce XM dit quelque chose de vous et… amène les autres à vous juger.

Si vous achetez une voiture qui hurle à la face du monde « Poussez-vous d’mon chemin », vous êtes en droit d’en attendre de la puissance. Et vous l’avez ! Derrière ces énôÔôrmes naseaux lumineux se cache le V8 4.4 biturbo de M qui développe ici 489 ch. Un peu juste ? Il est donc aidé par un bloc électrique intégré à la boîte pour un total de 653 ch et 800 Nm. De quoi catapulter les 2 711 kg du XM de 0 à 100 km/h en 4,3 s. Le même temps que la BMW M2 !

Le démarrage n’est pas si prometteur. Vous appuyez avec assurance sur le bouton Start rouge et… rien ne se passe. Sauf un « wouzzzz » électronique accompagné d’une animation lumineuse aux couleurs de M autour du ciel de toit. Ah oui, il faut qu’on en parle ! Un ciel de toit texturé en 3D façon origami très… heu… non, ça ne vient pas, je ne sais pas quoi en dire.

Pour le coup, le reste de l’habitacle est plutôt sobre. D’ailleurs BMW nous a expliqué que la philosophe de ce XM était à la croisée de la performance et du luxe. Pour la performance on a bien des logos et des rappels de couleur M un peu partout et un engageant volant presque identique à celui de la M5.

Pour le luxe je suis un peu resté sur ma faim. Sauf sur les sièges, les avants sont sublimes et, à l’arrière, le cuir de la sellerie se prolonge sur les portes pour un effet cocon très réussit. Mais globalement, l’habitacle est, selon moi, moins marquant que celui du iX. Les matériaux sont plus classiques. Beaux, mais classiques. Et malheureusement la chasse aux boutons a eu raison des commandes de clim, mais on garde un bouton de volume et… globalement, l’ergonomie est plutôt bonne si on adhère au iDrive BMW (personnellement j’y suis allergique).

Pardon, je me suis arrêté au moment du démarrage. Reprenons. Comme tout bon hybride vertueux, le XM démarre toujours en tout électrique dans un silence de cathédrale. Une cathédrale dans laquelle s’est invité le compositeur Hans Zimmer qui a signé la (très réussie) « bande son » de la traction électrique. Et malgré le fait qu’il soit plus lourd que le Palais du Reichstag, son seul moteur électrique, dont la puissance est celle d’une Golf V GTI, lui permet d’atteindre les 140 km/h. Problème, à partir de 70/80 km/h, le silence s’estompe pour laisser place à… des bruits d’air générés par les énormes rétros. Heureusement, BMW fournit un accessoire idéal pour y remédier : le V8 4.4 biturbo. Le son du V8 couvre avantageusement les bruits aéros et à pleine charge il offre une sonorité ronde, puissante et rageuse. Hans Zimmer en ville, les grognements du V8 à l’attaque, jusqu’ici tout va bien. Vraiment. Mais dans certaines conditions comme une petite nationale prise à bon rythme mais pas le couteau entre les dents, le son navigue de Hans au V8 en fonction du mode de traction et comme le mode de traction s’adapte en permanence… ça devient brouillon.

Ce qui est très net en revanche, c’est l’accélération. Sur un départ arrêté, on peut parler d’impact tant l’arrivée de la puissance est violente. Plus que dans les voitures électriques que j’ai pu tester, même sportives. Le choc de l’accélération initiale est très sec, le couple instantané catapulte l’ensemble sur les 10 premiers mètres le temps que les turbos s’activent puis le V8 prend le relai et la poussée ne s’arrête pas. Mais ça, c’est en départ arrêté. En roulage, si vous décidez d’enfoncer la pédale sans prévenir, la relance se fait attendre. La faute à une boîte qui semble vous demander « ah bon, t’es sûr… ? » avant d’envoyer les watts. Ou la cavalerie. Ou, en l’occurrence, les deux. Une tendance de fond qu’on a déjà rencontré chez d’autres constructeurs, probablement à cause de normes anti-pollution qui donnent cette impression de boîte feignante. Car si vous la gérez avec les (sublimes) palettes carbones au volant, l’efficacité est au rendez-vous.

Mais le plus impressionnant avec cette armoire bavaroise sur roues, c’est la gestion qu’elle a de son gabarit et de son poids. Il faut dire que les ingénieurs BMW ont mis tout leur savoir-faire dans le châssis avec quatre roues directrices, un système anti-roulis actif 48V, des suspensions pneumatiques et l’ensemble fait mieux que bien. C’est de l’ordre du miracle. Au volant, impossible de dire qu’il fait 2,7 tonnes et 5,11 x 2,23m. Ça fait 11,40 m2 au sol. Pour rappel, en France on paie des impôts sur une piscine à partir de 10 m2 ! Et pourtant, sans être une ballerine, il se montre agile, vire quasiment à plat et les vitesses de passage en courbe sont au-delà d’impressionnantes. Elles sont terrifiantes. Même le freinage suit malgré l’absence de pack carbone céramique. Je ne vous conseille pas de descendre le Ventoux en mode « spéciale de rallye » mais ça s’arrête.

Malheureusement, le freinage manque de mordant à l’attaque et, surtout, d’information. Comme tout le reste à vrai dire. Comme une immense majorité de voitures qui déploient des trésors de technologie pour tromper la physique, il y a une sorte de filtre entre vous et l’expérience. Un manque de naturel qui n’est, à mon sens, pas en accord avec ce que BMW veut nous vendre : une vraie M.

En fait, le XM est plein de qualités mais c’est comme s’il avait du mal à faire la synthèse de lui-même. Il tente d’être trop de choses à la fois sans vraiment y parvenir. L’inverse de son physique tranchant. Il se veut SUV et haute-performances et hybride et luxueux et héritier d’une certaine vision de l’automobile, le résultat est un SUV, mais haute-performances, mais hybride, mais luxueux et, selon moi, pas du tout héritier d’une certaine vision de l’automobile, malgré le discours marketing et certains artifices comme le clin d’œil à la M1 avec les deux hélices gravées dans les coins supérieurs de la lunette arrière. C’est un peu comme si vous marquiez Léonard de Vinci sur un bonhomme en bâtons dessiné par votre enfant, et que vous disiez à tout le monde que c’est un hommage à la Joconde.

Sincèrement, Hans et Gunther auraient pu s’accommoder d’une hybridation, mais le coup du SUV… J’ai posé la question ! Réponse : « Dans les années 70, les gens qui cherchaient des voitures de sport voulaient des coupés. De nos jours ils veulent des SUV. » Admettons. Effrayant mais admettons. Même si j’ai tendance à penser que les clients de SUV sportifs sont des clients de SUV qui cherchent de la sportivité et pas des clients de sportives radicales qui remplacent leur M4 CSL par un SUV, sinon je rends mon tablier.

Et donc, en bon SUV, ce XM propose un toit vitré, ouvrant ou non ? « Non car les clients de modèles M ne commandent généralement pas de toit en verre. » Forcément, une M4 CSL serait moins CSL avec un toit en verre à la place du carbone… Et ce truc du toit est typique du XM. Pas vraiment M, mais pas vraiment SUV non-plus… Je sais, je suis en boucle et je pense savoir pourquoi. Je ne digère pas le dévoiement (selon moi, toujours) de la division M (Motorsport) par l’autre division M (Marketing). Mais c’est leur marque, leur histoire, leur patrimoine et ils font bien ce qu’ils veulent. Est-ce qu’il va se vendre chez nous ? Il semble que la période de pré-réservation soit très bonne, le XM étant le meilleur démarrage d’un modèle M. Le fait qu’il échappe à tout malus, même au poids, n’y est certainement pas pour rien… Et ailleurs ? Encore plus ! Et ce sera mérité. Le XM est objectivement un SUV sportif, voire hautes performances, dont les perfs et le comportement lui assurent une place de choix sur un marché très spécifique. Même s’il ne fera pas… le poids (je l’ai faite) face à un Aston Martin DBX 707. Ou même, plus proche, un X6 M. Donc si je devais le noter simplement en tant que modèle M, je lui collerais un 4/10. Et ce serait bien payé… Mais il a pour lui ce que beaucoup lui reprocheront, son look, son originalité… sa singularité et, quand même, des performances assez remarquables. Si c’était un X8 M, il aurait probablement décroché un 8/10.

En savoir plus à ce sujet :

BMW XM

Année
2023
Prix mini
178000 €
Type de moteur
Hybride rechargeable
Longueur
5110 mm
Largeur
2010 mm
Hauteur
1760 mm
Poids
2711 kg
Boîte de vitesses
Automatique
Nombre de rapports
8
Transmission
Transmission intégrale
Puissance
653 ch
Couple
800 Nm
0 à 100 km/h
4,3 s.
Vitesse max
250 km/h
Conso
n.c. l/100km
Rejets
33 g/km CO2
Capacité
29,5
Autonomie
82 km

Moteur thermique

Type
Thermique
Nombre de cylindres
8
Cylindrée
4395 cm³
Alimentation
Turbo
Type carburant
Essence
Puissance
489 ch
Couple
650 Nm

Moteur électrique

Type
Électrique
Position
Dans la boîte
Puissance
197 ch
Couple
280 Nm