En règle générale, les concepts de GTI sont des modèles de série à peine maquillés. Les constructeurs collent de grosses roues, des baquets et des ceintures rouges à une auto déjà parée pour la route, la posent sur un stand et surveillent les forums, comptant le nombre de « Chérie ! Banco, on vend la caravane ! ». Une petite sportive de ce genre doit rester un achat pas trop dur à justifier.
2004. Ford vient de commercialiser la première Focus RS, une compacte ultraperformante aux trains roulants de compétition, dont on a appris depuis qu’elle était vendue à perte (environ 5 000 € par voiture, à cause d’une fabrication quasi artisanale). Les aficionados des RS sont à bloc. Devant la Fiesta ST (150 ch), ils se prennent logiquement à espérer une RS aussi affûtée que la Focus, un engin avec des ailes bien larges et quelque chose comme 190 ch, histoire de renvoyer la Clio II RS dans les cordes.
Au salon de Genève 2004, Ford va leur donner exactement ce qu’ils appelaient de leurs vœux. Le concept Fiesta RS, issu du Rallye Concept de 2002, fait admirer un kit carrosserie bodybuildé à souhait et une livrée inspirée de la toute-puissante GT. Quinze ans après, avouez qu’elle a toujours une sacrée bonne bouille.
Ford n’avait pas fait les choses à moitié. Regardez cet intérieur tout prêt à être mis en production. À l’époque, c’était Jost Capito qui dirigeait Ford RS, celui-là même qui allait emmener Volkswagen vers l’hégémonie absolue en rallye. Il nota que la Fiesta RS était attendue de pied ferme par une clientèle de connaisseurs.
C’est là que ça a coincé financièrement. Pour tenir les promesses de de cet alléchant concept, il aurait fallu des moyens que Ford n’avait plus à ce moment-là, rincé par une Focus RS qui avait chamboulé la catégorie mais lui avait coûté beaucoup d’argent. Le projet fut avorté, et il fallut attendre pas moins de cinq ans pour voir arriver un autre produit Ford RS sous la forme de la terrible Focus RS Mk II.
Pire, la Fiesta RS avait tellement fait saliver les amateurs que la demande pour la ST diminua nettement. Il faut dire que si c’était une excellente voiture, elle n’était pas la référence absolue qu’est aujourd’hui sa descendante.
Entre l’actuelle Fiesta ST, reine incontestée des citadines pêchues, et la Focus RS, préretraitée qui continue à en remontrer aux Audi RS3 et Mercedes A45 AMG, Ford s’est depuis hissé sur le toit du monde des GTI. Y serait-il parvenu encore plus vite si la Fiesta RS avait vu le jour ? Se serait-il au contraire reposé sur ses lauriers ensuite au risque de ne jamais atteindre l’excellence des Ford ST et RS actuelles ? On n’en sait rien, mais carpe diem.