Lotus vous annonce la naissance d’Evija : 1600 kg pour 2000 ch

La première hypercar badgée Lotus est un OVNI 100% électrique de 2000 ch

Valentin Langard
Publié le : 17 juillet 2019

Son nom. Avant d’étudier ses lignes, évoquer sa puissance ou les raisons pour lesquelles la marque pense pouvoir aller marcher sur les plates-bandes de Bugatti & Co, parlons du nom porté par la première hypercar de Lotus. Après tout, quelle voiture de rêve oserait s’inviter sur le parking du Casino de Monaco ou dans un garage secret sur-climatisé d’Abu Dhabi sans un nom interpelant et parfois (souvent) imprononçable ?

Vous aviez appris (on espère) à articuler Huayra, Wraith, Koenigsegg… Voici maintenant un nouveau défi : Evija. Non, pas « Éé-vie-djah ». Plutôt « Ouh-aïe-ah ». Ça aurait pu être le prénom d’un rejeton de de la famille Stark de Game of Thrones mais apparemment, cela signifie « la première à exister ». Et si l’on remonte jusqu’aux racines hébraïques du terme, ça se traduit grossièrement par « vivre, respirer ». Culture, quand tu nous tiens ! Au moins ça commence par un E, ce qui réjouira les puristes Lotus. Plus que la fiche technique en tous cas…

Voici donc le ticket d’entrée du Royaume-Uni pour l’ère des hypercars électriques. Est-ce là le seul et unique futur possible pour l’automobile sportive ou seulement les prémices de quelque chose de plus grand encore, Lotus n’a en tout cas pas l’intention de se tourner les pouces en attendant de le savoir et abat toutes ses cartes d’entrée de jeu.

Bien sûr, lesdites cartes ne sortent pas de nulle part. Lotus doit sa promotion en division exotique à son nouveau propriétaire : Geely – l’un des plus grands constructeurs automobile chinois. Le nom vous dit quelque chose ? C’est normal, ils n’en sont pas à leur premier rachat. Il s’était déjà offert Volvo en 2010 (et l’opération ressemble à un franc succès) et le marché des taxis londoniens en 2013… Le point commun entre tout ça ? L’électrification. De Polestar aux taxis hybrides en passant maintenant par le comté du Norfolk – où les 130 Evija seront construites – Geely n’imagine pas le futur sans batteries.

Vous commencez à vous remettre de la claque visuelle ? C’est le moment de parler chiffres. Quand le projet a été évoqué pour la première fois, le chiffre de 1000 chevaux avait été avancé. Rien de choquant jusque-là : si ce pallier n’était autrefois réservé qu’à Bugatti et Koenigsegg, il est devenu incontournable pour espérer être pris au sérieux. Les temps changent ma bonne dame.

Il faut dire qu’en ce qui concerne les hypercars électriques, les chiffres s’affolent. La Rimac C_Two promet plus de 1900 chevaux. La Pininfarina Battista ? Même chose. C’est la fin des préparations moteur telles qu’on les connaît. Aujourd’hui, tant que le processeur peut gérer le calcul, vous n’avez qu’à taper le chiffre qui vous chante. Et au diable ce qu’en penseront vos pneus.

L’objectif de Lotus, c’est de faire de l’Evija (ne vous faîtes pas un claquage aux mandibules, pas d’inquiétude, on va tous prononcer évija) la voiture la plus puissante jamais sortie d’usine avec pas moins de 2000 chevaux. Le couple – de 1700 Nm (plus du double que ce qu’une McLaren Senna peut fournir) – sera réparti entre les quatre roues. C’est d’ailleurs la première Lotus à transmission intégrale homologuée sur route… et ce n’est même pas un SUV, youpi !

Oui, une telle puissance est difficile à envisager. Habituellement chez Lotus, on est plus habitué à entendre les neurones éclater à la recherche du moindre gramme à économiser. Et pourtant, Louis Kerr – ingénieur en chef – nous maintient que Lotus se concentre toujours sur la perte de poids, pas sur la course à la puissance. « Poids plume et efficience, c’est depuis toujours au cœur de notre ADN. Ça ne changera pas », nous promet-il.

Le poids donc. Le chiffre est, là encore, provisoire mais on nous parle de 1680 kg « dans la finition la plus légère ». Les acheteurs pourront donc vraisemblablement payer le prix fort pour débarrasser leur Evija de tout ce qui est superflu – façon Porsche 918 Spyder pack Weissach. En tout cas, avec un pilote derrière le volant, tout le carbone du monde ne pourra faire passer l’Evija en-dessous d’1,7 tonne. Ça fait quand même beaucoup pour une Lotus… D’ailleurs, est-ce qu’on vous a dit qu’elle faisait 2 m de large ?

La bonne nouvelle c’est qu’elle reste moins lourde qu’une Rimac de 1950 kg. Ça n’en fait pas un poids plume, mais elle est au moins la plus légère de cette nouvelle race d’hypercars. On nous dit aussi que la répartition du poids entre les essieux est parfaitement égale, même avec les batteries placées en position centrale arrière.

On peut s’attendre à du lourd côté perfs. On reste encore et toujours au conditionnel, mais l’Evija devrait passer de 0 à 100 km/h en moins de 3 secondes et jusqu’à 300 km/h en moins de 9 (il en faut 13,6 à la Chiron). La vitesse max, elle, devrait tourner autour de 320 km/h. Le tout dans le silence total.

Les 130 futurs acquéreurs, qui vont chacun dépenser aux alentours de 2 millions d’euros (hors taxes), seront en revanche ravis d’apprendre que cette coquette somme leur permettra d’acquérir beaucoup « d’espace négatif ». Explications avec le designer en chef de Lotus, Russel Carr.

« La disposition du pack de batteries et des moteurs nous a offert beaucoup de liberté pour dessiner l’arrière du véhicule et le diffuseur. C’est comme cela qu’on a pu créer ces deux gros tunnels à effet Venturi. Les besoins en refroidissement sont moindres que sur un moteur de 1000 chevaux à combustion interne, cela permet donc d’utiliser plus d’air pour l’aérodynamisme ».

Intéressant. Mais en quoi est-ce une Lotus, visuellement parlant ? « Les hanches proéminentes et musclées, l’habitacle près du sol… ce sont des éléments que l’on retrouve sur l’Elise, sur l’Exige, et même sur nos vieilles voitures de course, comme la 11 et la 40 », explique Carr. « Les lignes de profil qui s’écartent pour former ce tunnel à effet Venturi rappellent les prises d’air latérales plus traditionnelles de l’Elise et de l’Exige ».

Le patron du design est formel : il n’a jamais été question de se laisser influencer par de quelconques inspirations rétro style Ford GT. Du côté de la mécanique, on n’a jamais mentionné l’hybride non plus. L’Evija est un cercle vertueux : pas de moteur = moins de refroidissement = aérodynamique plus astucieuse. Ces tunnels sont incroyables, non ? Ce qui fascine vraiment quand on tourne autour de l’Evija, c’est l’impression qu’elle donne de changer de forme selon l’angle à partir duquel on la regarde, comme une œuvre d’art tout en perspective.

Face trois-quarts avant, c’est un objet solide au style percutant et aux hanches larges. Faites un pas de côté – vers la gauche ou la droite peu importe – et c’est là que vous remarquez tous les petits détails qui donnent l’impression que l’Evija vient d’une autre planète.

Lotus et Williams Advanced Engineering ont déjà commencé les essais sur simulateur et Lotus a probablement déjà apporté les touches finales à son premier prototype fonctionnel.

On nous assure que le look ne changera pas. Des caméras escamotables qui servent de rétroviseurs jusqu’à la suspension visible à travers la lunette arrière en passant par l’unique écran devant le conducteur ou le volant rectangulaire typé course, tout est approuvé. L’intérieur est Huracánesque : Jamais une Lotus n’avait été aussi bien finie.

On ne sait pas encore où, comment, ni même pourquoi les acquéreurs de l’Evija vont faire rouler leur nouveau jouet, mais Lotus s’intéresse à la praticité. L’interface utilisateur est intuitive, et on annonce une autonomie maximale de 400 kilomètres. C’est à peu près ce que l’on tire d’une Lambo ou d’une Pagani à moteur V12, en y allant mollo – ce que personne ne fait. Avec un chargeur de 350 kW, elle se recharge entièrement en 18 minutes. Reste à trouver une borne à 350kW… Booonnchance !

Ah, oui ! Une anecdote qui fait sourire. Le 16 novembre 1990, le Parlement du Royaume-Uni voyait d’un mauvais œil l’arrivée sur le marché de la Lotus Carlton (une Opel Omega revisitée par la firme britannique). Une berline familiale de 377 chevaux capable de monter jusqu’à 280 km/h, était-ce bien raisonnable à l’époque où les constructeurs allemands installaient leurs premières brides électroniques ? 30 ans plus tard, Lotus pose une hypercar de 2000 chevaux sur la table, sans la moindre pression. Les temps changent ma bonne dame…

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