Pourquoi les investisseurs boudent la voiture électrique

Volvo a annoncé qu'il ne financerait plus Polestar, mais ce n'est que l'un des exemples du trou d'air traversé par la voiture électrique.

Paul HORRELL
Publié le : 5 février 2024

Les investisseurs du monde entier sont devenus frileux vis-à-vis de la production de voitures électriques. La semaine dernière, Volvo a annoncé qu’il cesserait de financer sa filiale électrico-premium Polestar. Créée en 2017, celle-ci est désormais directement confiée aux bons soins de la maison-mère chinoise Geely. Quelques jours avant, Renault annulait l’introduction en bourse de sa filiale Ampere face à la perspective d’une valorisation insuffisante. Idem pour Volkswagen avec sa division batteries PowerCo. Tesla lui-même a vu ses actions perdre 30 % de leur valeur cette année.

Que se passe-t-il ? Chaque cas est évidemment différent, mais les marchés financiers ont été échaudés par la croissance décevante des ventes de voitures électriques. Car les marchés recherchent avant tout un retour rapide sur investissement, comme c’était déjà le cas avec la voiture thermique.

Mais les investisseurs réagissent aussi aux événements politiques. Si Donald Trump revient à la Maison Blanche l’an prochain, il s’empressera sans doute de revenir sur les engagements de Joe Biden à réduire les émissions de CO2 de l’économie américaine. Les ventes de voitures électriques seraient annihilées là-bas du jour au lendemain.

C’est l’inverse qui continue de se passer en Chine, où le soutien du gouvernement se traduit par la domination des constructeurs d’électriques sur leur marché domestique. Cela leur permet aussi d’inonder l’Europe de voitures à bas prix, ce qui terrifie nos constructeurs. Ces derniers pressent l’Union européenne d’ériger des barrières commerciales le temps qu’eux-mêmes arrivent à réduire leurs coûts.

La conjoncture économique globale n’aide pas. Thermique ou électrique, les taux d’intérêt élevés sont un obstacle majeur pour toutes les ventes automobiles. Les électriques, généralement plus chères, sont toutefois particulièrement sensibles à une hausse des loyers.

Là où les gouvernements mettent en place des incitations, les ventes se maintiennent. Des volumes importants devraient se traduire à terme par une baisse des coûts de production et donc des prix, jusqu’à un point où ces béquilles ne seront plus nécessaires pour trouver des débouchés. Mais il y a encore peu de pays où ça s’est produit à travers le monde.

Face à cette situation, chacun des constructeurs a des problèmes et des réponses différentes.

Malgré la présentation de plusieurs nouveautés à venir, Polestar a toujours du mal à vendre son modèle phare, la 2. La concurrence est de plus en plus dense et féroce, et Polestar se targue de privilégier les profits aux volumes. C’est souvent ce que disent les constructeurs qui n’arrivent pas à vendre de voitures…

Volvo va donc officiellement arrêter d’investir dans Polestar, tout en maintenant une coopération technique. Polestar est entré en bourse en 2022 (Volvo détenant alors 48 % de ses actions) mais les ventes sont en chute libre. La maison mère Geely promet qu’il continuera de soutenir aussi bien Volvo que Polestar. Volvo annonce que ses marges sur les voitures électriques ont désormais grimpé à une honorable valeur de 13 %. Polestar s’encroûte à 2 %.

Tesla s’est bien gardé d’annoncer des objectifs de ventes pour le Cybertruck, un véhicule cher et compliqué à produire. Elon Musk ne prédit de toute façon pas de nouvelle véritable phase de croissance avant l’arrivée d’une très attendue compacte. Il ne donne aucune date, se contentant de préciser que les prévisions à fin 2025 sont optimistes. Il a confirmé qu’ils avaient « bien avancé », mais qu’il y avait encore beaucoup à faire : « Ce sera profond. Pas seulement la conception de la voiture elle-même, mais celle de tout le système de production. »

Pendant ce temps-là, la guerre des prix lancée par Tesla ne semble pas avoir eu un effet bœuf sur les ventes de Model 3 ou Y.

Il n’est donc pas vraiment étonnant que les marchés se soient désintéressés de la division de Renault dédiée au développement et à la production de sa plate-forme électrique, Ampere. Renault estime que le groupe est en suffisamment bonne santé pour ne pas avoir besoin des liquidités qu’une introduction en bourse aurait générées. Il a donc annulé cette dernière. La clé sera de toute façon d’arriver à produire et à vendre des voitures électriques à moindre coût. Le lancement de la Renault 5 cette année sera l’épreuve de vérité.

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