Aston Martin DBS 770 Ultimate

L'adieu au V12 ? Peut-être, mais en beauté !

Ollie Kew
Publié le : 13 juin 2023

8 10
Les plus Moteur époustouflant, châssis enfin au niveau, charisme dévastateur
Les moins Ergonomie ratée, technologie embarquée désuète, la (probable) fin du V12

DBS, DBS… C’est la vieille Aston, ça, non ?

Oui, une Aston comme on ne va bientôt plus en faire. Vous avez découvert il y a quelques semaines la DB12, avec son intérieur sublime et pas plus de huit cylindres sous le capot. C’est la direction que prend la marque. La DBS 770 Ultimate, c’est une Aston d’avant.

Ne me dites rien. Quelques chevaux en plus, de la fibre de carbone, et les jantes de la Victor ?

C’est un peu laconique, mais c’est à peu près ça, si l’on regarde les choses froidement. Une pression de suralimentation en hausse et une nouvelle gestion électronique donnent au V12 5,2 l biturbo la dernière chose dont il avait besoin : plus de punch. La DBS standard faisait 725 ch, ce qui était déjà beaucoup quand on sait qu’une DB11 de 608 ch pouvait se montrer piégeuse, notamment sur le mouillé.

Dans la DBS Ultimate, on a droit à encore 45 ch de plus, soit 770 au total. La seule raison pour laquelle le couple stagne à 900 Nm est sans doute que si Aston ne tenait pas le V12 en laisse, il vaporiserait instantanément la boîte automatique à huit rapports là-derrière.

Sinon, vous avez évidemment remarqué les étranges jantes façon toile d’araignée, inspirées par les roues optionnelles de la Valkyrie et déjà vues sur la Victor. Quelques petits appendices en carbone (notez la lame avant et les jupes latérales inédites) sont les seuls autres indices visuels que vous êtes devant l’un des 499 exemplaires de cette DBS d’adieu (300 en coupé, et 199 en cabriolet Volante).

Elle est magnifique, non ?

Ah ça, la DBS n’a jamais manqué de présence. C’est une péniche, mais ses proportions sont sublimes, et son charisme moins… footballistique, disons, que celui d’une Ferrari 812 ou d’une Lamborghini Aventador. Aston Martin a beau enchaîner crise sur crise, ses dessins sont toujours aussi magistraux, et la DBS en est la quintessence.

Et la bande-son est à la hauteur ?

Le V12 a cette note d’échappement soyeuse qu’aucun V8 ne pourra jamais offrir, même s’il est moins musical que l’ancien 5,9 l atmosphérique des DB9 et Vanquish. Et ce coffre… Quand, au ralenti, vous donnez juste une pichenette sur l’accélérateur, vous avez droit à un grognement sépulcral plutôt qu’à un miaulement italien. La voiture tout entière tremble sur ses fondations, comme si le V12 tentait de s’évader de sous le gigantesque capot « clamshell » en fibre de carbone.

D’accord, d’accord. Mais une fois qu’on a fait le tour, Aston Martin nous donne juste plus de la même chose, non ? De la puissance et du style en pagaille, mais toujours pas les moyens de vraiment menacer les allemandes…

Il faut reconnaître que les Aston ne gagnent pas souvent aux points. La Vantage se fait tourner autour par la moindre Porsche 911, la Bentley Continental est une GT plus compétente que feu la DB11. Ferrari est encore dans une autre dimension. Le DBX est un excellent super-SUV… mais pas deux fois meilleur qu’un Cayenne. Qui coûte deux fois moins cher.

On aurait pardonné à Aston d’avoir juste retouché la DBS avec quelques chevaux symboliques, un peu de carbone, et roulez jeunesse. Ce n’est pas ce qu’ils ont fait. Ils ont complètement revu les fondamentaux de leur vénérable fleuron.

La direction assistée a été recalibrée pour un meilleur ressenti, et le support de la colonne de direction rigidifié. Les réglages de la suspension pilotée (GT, Sport et Sport Plus) ont été complètement revus. Ils en ont aussi manifestement profité pour marabouter la boîte de vitesses.

Vous n’allez quand même pas faire le coup de « la voiture qu’elle aurait toujours dû être » ?

Je sais bien que c’est un poncif, mais il faut reconnaître qu’Aston Martin nous a souvent donné l’occasion de l’employer. Et encore une fois, nom d’une soupape en titane, cette Ultimate est une DBS complètement et largement améliorée. Elle est sen-sa-tio-nnelle.

D’abord, il y a la puissance. Oubliez les chiffres (0 à 100 km/h en 3,4 s, 340 km/h, des détails) et songez plutôt qu’il est maintenant envisageable de l’utiliser. La boîte obéit. L’ESP ne panique pas. Cette voiture est infiniment véloce, dans le genre élastique (de catapulte), mais tous les flottements et les réactions parasites de la DBS standard, quand elle luttait avec ses quelque 700 ch à passer au sol, se sont évaporés. On a enfin confiance au moment de déchaîner ce moteur de warbird.

Ensuite, il y a le confort. C’est tout simplement l’une des voitures les plus sereines du monde sur mauvaise route. Aucune autre grosse GT à moteur avant ne peut rivaliser avec son moelleux, et pourtant elle ne se désunit absolument pas quand on appuie, tout en contrôle. Les réglages les plus raides profitent à la précision sans jamais vous faire sauter les plombages, mais ils ne trouveront leur utilité que sur un circuit bien lisse.

On peut donc exploiter la puissance, s’amuser dans les virages (car la direction a elle aussi considérablement gagné en tranchant) et, quand on n’est pas en train de poursuivre un tueur du SPECTRE, la DBS Ultimate reste douce et feutrée. Sans compter qu’elle suscite des regards plus sympathiques que la supercar italo-teutonne moyenne. Peu d’autos vous font vous sentir aussi bien dans votre peau. Si Aston avait fait cette mise à jour il y a quelques années, la vie de la Bentley Continental GT et de la Ferrari GTC4Lusso eût été moins tranquille.

Bien joué Aston ! Mais la DBS Ultimate vaut-elle malgré tout ses plus de 300 000 € ?

Pas avec cet intérieur, j’en ai bien peur. Oui, je sais que cette voiture n’est plus toute jeune. D’ailleurs, Aston a implicitement reconnu le ratage de ce cockpit en repartant d’une page blanche pour celui de la nouvelle DB12. Mais si quelque chose peut gâcher la fête au volant de la DBS Ultimate, c’est bien ça.

Le vieux système infodivertissement Mercedes pouvait à la limite se justifier pour réduire les coûts, même si c’est toujours une excuse embarrassante à ce niveau de prix. Sauf que même les éléments conçus en interne sont une catastrophe. Les boutons de la transmission sont capricieux, le touchpad central est inutilisable, les molettes font cheap, il n’y a nulle part où ranger l’énorme clef. Le couvercle de vide-poche motorisé est amusant 2 minutes puis pénible, et il n’y a pas de boîte à gants. Je ne parle même pas de la visibilité désastreuse.

La seule nouveauté sur cette DBS Ultimate, ce sont les deux appareils de torture à structure en carbone qu’Aston Martin appelle des « sièges ». Attention, une fois qu’on est bien calé dedans, ils offrent un confort et un maintien remarquables. C’est juste que vous serez en train d’appeler le SAMU pour extraire le support latéral en carbone de votre rectum. Si vous y arrivez, parce que le téléphone fonctionne très mal.

Pas de quoi faire hésiter, tout de même ?

Franchement, si, même si la question ne se posera pas car tout est déjà vendu. La bonne nouvelle, c’est qu’Aston Martin ne s’est pas amusé à revoir la DBS de fond en comble juste pour 499 voitures : c’est surtout à la nouvelle DB12 que ces leçons profiteront. Même si l’on dirait un gros restylage de la DB11, elle pourrait donc bien être la meilleure Aston de tous les temps.

La seule chose qui lui manquera ? Un V12. Pour ça, la vénérable Ultimate restera incontournable. Et la DBS pourra se vanter d’avoir réussi sa sortie.

En savoir plus à ce sujet :

Aston Martin DBS 770 Ultimate

Année
2023
Type de moteur
Thermique
Longueur
4715 mm
Largeur
1970 mm
Hauteur
1285 mm
Poids
1845 kg
Boîte de vitesses
automatique
Nombre de rapports
8
Transmission
propulsion
Puissance
770 ch
Couple
900 Nm
0 à 100 km/h
3,4 s.
Vitesse max
340 km/h

V12

Type
Thermique
Nombre de cylindres
12
Cylindrée
5204 cm³
Alimentation
biturbo
Type carburant
essence
Puissance
770 ch
Couple
900 Nm