Il y a environ 25 ans, le président du conseil d’administration du groupe Volkswagen, Ferdinand Piëch, a déclaré qu’il voulait produire en série une voiture de 1001 ch capable de dépasser les 400 km/h. Comment ? On verrait ça en route.
Pour cela, il était initialement prévu que la voiture qui allait devenir la Veyron reçoive un W18. Bugatti a ressorti de ses collections quatre concept cars illustrant la transition entre un voyage en train de Ferdinand Piëch et la voiture la plus rapide du monde.
C’est en effet en 1997 lors d’un trajet à bord du Shinkansen (le TGV nippon) que Ferdinand Piëch, brillant ingénieur avant de prendre les rênes de la modeste entreprise familiale, aurait esquissé le 18 cylindres en W qui devait animer l’hypercar de ses rêves, raconte Bugatti.
Il a ensuite demandé à Giorgetto Giugiaro chez Ital Design de lui dessiner un concept car capable d’accueillir ce moteur titanesque. Et au Mondial de l’Automobile 1998, la marque Bugatti a officiellement refait surface avec un grand coupé EB118 à moteur avant, hommage à la Type 57CS Atlantic, dont le long capot accueillait un W18 6,3 l atmosphérique de 555 ch. On était encore loin du compte, mais les bases étaient posées.
Six mois plus tard, au salon de Genève 2019, on découvrait la Bugatti EB218, variante quatre portes de l’EB118… et réincarnation de l’EB112 mort-née au début de la décennie, lorsque le précédent propriétaire de Bugatti Romano Artioli avait jeté l’éponge. Cette élégante limousine reprenait le W18 à l’identique.
Il a fallu attendre encore quelques mois et le salon de Francfort 2019 pour que Bugatti loge ce moteur dans une véritable supercar à moteur central, en l’occurence le concept EB 18/3 Chiron. Cette fois, c’est le fils de Giorgetto Giugiaro, Fabrizio, qui a tenu le crayon. C’est là qu’on a commencé à entrevoir la Veyron, même si l’appellation Chiron ne tombera pas dans l’oubli…
À cette étude de style, rétrospectivement une sorte de chaînon manquant entre l’EB110 et la Veyron, succédera le mois d’après un concept EB 18/4 dessiné en interne par Jozef Kaban. Visuellement, on y était. Pour le nom aussi, puisque cette voiture est baptisée en hommage au pilote d’essai Bugatti Pierre Veyron, vainqueur notamment des 24 Heures du Mans 1939 au volant d’une Type 57C.
Restait à peaufiner la mécanique pour répondre au cahier des charges mégalomaniaque établi par Ferdinand Piëch. Cependant, « l’immense défi d’en extraire plus de 1000 ch avec fiabilité » et la complexité du W18 atmo (notamment en matière de refroidissement) a conduit les ingénieurs Bugatti à l’amputer de deux cylindres tout en le portant à 8 l et en lui greffant pas moins de quatre turbos. Après de longues années de développement, ils ont enfin atteint leurs objectifs et en 2005, la Veyron a officiellement vu le jour.
Notez qu’auparavant, le groupe Volkswagen avait étrenné ce W16 dans une version atmosphérique sur les concept cars Bentley Hunaudières (1999) et Audi Rosemeyer (2000). Mais la Veyron, puis la Chiron et tous leurs dérivés, restent les seules voitures « de série » à l’avoir reçu. Ce moteur hors norme vient de tirer sa révérence sous le capot de la fabuleuse Bolide, à l’essai ici.
On ne s’inquiète toutefois pas trop pour sa succession…