Hennessey Venom F5 : à bord de la prochaine voiture la plus rapide du monde

1 817 ch, 1 360 kg, 500 km/h : tremblez Bugatti et Koenigsegg, la Hennessey Venom F5 se dévoile dans sa version finale. Et nous avons pu monter dedans...

Jack RIX
Publié le : 16 décembre 2020

Vous avez sous les yeux la première Hennessey Venom F5 de préproduction. L’hypercar américaine s’est fait attendre, mais elle semble tenir ses promesses. Pourquoi F5, déjà ? C’est une référence à l’échelle de Fujita, utilisée pour mesurer l’intensité d’une tornade. F5 en est le stade le plus… intense, avec des vents atteignant les 512 km/h. Un chiffre qui prendra toute son importance d’ici quelques paragraphes…

Prêts pour d’autres chiffres ? Attention, il va peut-être falloir rebooter votre cerveau un instant pour les intégrer. Le moteur de la F5 est un V8 6,6 l biturbo (Fury, de son petit nom) développant 1 817 ch à 8 000 tr/min et 1 617 Nm à 5 500 tr/min. Ce qui en fait tout simplement la voiture de route la plus puissante du moment. S’il n’y avait que ça… Grâce à une structure monocoque et des panneaux de carrosserie en fibre de carbone, elle pèse 1 360 kg à sec. À peine 30 kg de plus qu’une Ferrari F8 Tributo 2,5 fois moins puissante. Cela nous donne un rapport poids/puissance de 0,75 kg/ch. 1 298 ch par tonne. On vous laisse quelques secondes pour digérer ça.

Même si le moteur est basé sur un V8 LS à vilebrequin en croix d’origine GM, tout est nouveau ou presque, depuis le carter sec au bloc en fonte, en passant par les culasses en aluminium et les soupapes d’admission en titane. Le tout est géré par une électronique issue du drag racing. Il faut bien ça avec la puissance de 7,5 Golf GTI… La boîte est robotisée, avec un seul embrayage et des palettes au volant. Compte tenu du rapport puissance/grip, la puissance est distribuée avec parcimonie sur les quatre premiers rapports, sans quoi ça patinerait encore à 250 km/h.

Les premières simulations prédisent un modeste 2,6 s sur le 0 à 100 km/h. C’est après que ça devient du sérieux : 0 à 200 km/h en 4,7 s, 0 à 400 km/h en 15,5 s. Sur ce dernier chrono, la Venom F5 serait plus deux fois plus rapide qu’une Chiron, et plus de 7 s devant une Koenigsegg Regera, l’actuelle détentrice du record sur un 0-400-0 km/h. En vitesse de pointe, Hennessey vise 500 km/h, la vitesse maxi théorique se situant à 534 km/h d’après l’étagement de boîte.

La F5 coûtera un peu plus de 2 millions d’euros et sera construite à 24 exemplaires. Et si j’en crois mon démarrage dans le studio et quelques coups de gaz jusqu’à ce que mes tympans bourdonnent et que les larmes me montent aux yeux, pour le bruit, ce sera comme être à l’intérieur d’une avalanche.

Pour quelqu’un qui découvrirait John Hennessey, il s’agit de l’homme qui a passé 30 ans à modifier à l’extrême des pick-ups, des muscle cars et des supercars, avec en point d’orgue la Venom GT. Basée sur une Lotus Exige, cette dernière était devenue la voiture la plus rapide du monde en 2014 (record non homologué, faute de tentative retour pour faire une moyenne des deux passages) avec une pointe à 435 km/h. « L’idée de la F5 est venue après le succès de la Venom GT, mais nous savions que nous n’aurions droit à tout le crédit que nous méritons qu’une fois que nous aurions construit notre propre voiture, explique John. Nous ne voulions pas d’un exploit ponctuel en vitesse maxi, nous voulions une voiture avec l’équilibre et l’appui nécessaires à 500 km/h, mais qui reste conduisible sur une petite route anglaise, ou un circuit. »

Pour ça, on verra plus tard, mais les fondamentaux semblent bien là. La baignoire en carbone ne pèse que 86 kg malgré une rigidité torsionnelle supérieure à celle d’une Chiron. Les amortisseurs sont réglables manuellement – et pas électroniquement – pour gagner du poids, les freins sont des carbone-céramique signés Brembo, les roues sont en aluminium forgé (19 pouces à l’avant, 20 à l’arrière) et les pneus sont de « simples » Michelin Sport Cup 2 même pas sur mesure. John est cependant convaincu qu’ils tiendront sans problème jusqu’à 500 km/h et au-delà.

« Nous pourrons surveiller chaque pneu quand la voiture passera les 200 km/h, les 300, les 400 et commencera à se rapprocher des 500. Nous connaîtrons la charge, la température et la pression en temps réel, et si à un moment nous sentons que la voiture ne devrait pas dépasser un certain point, nous la briderons peut-être. Mais nous ne voulons pas le faire, ce n’est pas notre intention. » Le premier test à haute vitesse de la F5 est prévu pour le printemps 2021 en Floride, sur la piste d’atterrissage des navettes spatiales du Kennedy Space Center.

« Quelle que soit la voiture que nous prendrons pour les tests, elle n’aura rien de spécial : la cartographie, les pneus, les réglages seront exactement les mêmes pour chacune des 24 voitures commercialisées. Ce tarmac fait 5 km de long, ce qui nous permettra de rouler à pleine charge sur 3,5 km avant de devoir ralentir. Quelles vitesses pouvons-nous atteindre sur cette distance ? Nous devrions flirter avec la barre des 300 mph [490 km/h], peut-être un peu moins, peut-être un peu plus. » Pas mal quand on se rappelle que c’est grosso modo deux fois plus court que l’anneau de vitesse de Ehra-Lessien dont disposait la Bugatti Chiron Super Sport 300+ lorsqu’elle a été mesurée à 490,484 km/h en 2019. Et l’on peut imaginer qu’après l’embarrassante mésaventure de la SSC Tuatara, ce ne soient pas des paroles en l’air chez Hennessey.

Pour réduire autant que possible la traînée sans trop nuire à la stabilité et ainsi garder le cap à ces vitesses stratosphériques, vous noterez qu’il n’y a aucun aileron fixe façon table à repasser, ni d’énorme lame avant ramasse-miettes. Mais si votre truc, c’est vraiment l’appui aérodynamique, John se fera une joie de vous fournir les pièces susdites dans un pack circuit. Personnellement, je la prendrais telle quelle, pure, fluide, ainsi qu’elle a été dessinée à l’origine. D’autant qu’il y a quand même de quoi frimer entre le diffuseur arrière, la grille en fibre de carbone usinée, et la quadruple sortie d’échappement en inox enchâssée dans un panneau recouvert de céramique résistante à la chaleur. Le même revêtement qu’à l’intérieur d’un canon d’arme à feu. Ah oui, John Hennessey est texan…

Ouvrez les portières papillon, admirez la finesse des seuils de porte, l’étonnante facilité avec laquelle on s’installe à bord, et l’ergonomie de ce cockpit extrêmement bien pensé. En plus d’évoquer un avion de chasse (à l’instar des graphismes de l’instrumentation numérique), le volant amputé de sa partie haute offre une visibilité parfaite vers l’avant.

Les minces baquets sont en carbone, rembourrés du strict minimum de cuir pour rendre un trajet routier supportable. Pour votre caleçon de rechange et votre brosse à dents, il faudra essayer de trouver une place derrière les sièges, dans la boîte à gants aux pieds du passager, ou dans l’un des vide-poches creusés dans la console centrale et au pied des portières. Le déclic des palettes est remarquablement satisfaisant, il y a un écran au milieu pour connecter votre smartphone, une molette physique pour la climatisation et une batterie de poussoirs sur la console centrale. Le reste des commodos (phares, essuie-glace, contact, sélecteur de mode) se trouve sur le moyeu du volant.

Trois des cinq modes de conduite (Wet, Sport et Track) font ce que vous imaginez : libérer la puissance et augmenter progressivement la tolérance des aides électroniques, la routine. Les deux autres méritent davantage qu’on s’y attarde. Le mode Drag favorise les départs arrêtés en intervenant non seulement sur la gestion de la puissance mais aussi en utilisant le système de levage hydraulique du nez pour mettre plus de poids sur l’arrière et ainsi améliorer la motricité. Quant au mode Vmax, c’est le seul à libérer la totalité des 1 817 ch. Mais pour le déverrouiller, il faudra suivre une journée de formation chez Hennessey. « Se contenter de donner les clefs aux propriétaires serait irresponsable« , admet John en souriant.

La Venom F5 s’annonce donc à peu près aussi délicate qu’une boule de démolition et il faudra la conduire avant de pouvoir dire si elle pose de nouveaux jalons, notamment par autre chose que sa pointe de vitesse. En tout cas, sur le papier, elle conjugue tant d’excès qu’elle paraît intouchable.

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